dimanche 14 décembre 2014

Nouvelle N°4 : Marylebone Lane - Dominique Terrier

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Le type recroquevillé, là-bas, au fond de la ruelle, c’est moi. Pas beau à voir le bonhomme. Je frotte ma poitrine perforée pour stopper les multiples hémorragies. Mes mains sont des compresses écarlates qui colmatent les brèches tant bien que mal. La vie se retire, pressée. Je ne suis plus qu’un tas de pâtes trop cuites, ratatinées au fond d’une passoire. Combien de litres de sang dans le corps humain ? Quatre ou cinq, un truc comme ça. La flaque de raisiné s’étend sur un bon mètre carré, il ne doit pas m’en rester beaucoup.
J’ai un paquet de défauts, inutile de prétendre le contraire. Tous ceux qui m’ont côtoyé, je parle des vivants bien entendu, c’est-à-dire pas grand-monde, peuvent me dénigrer à tour de bras : je suis un beau salopard. Ils vous diront aussi, ceux que j’ai coincés dans le recoin d’une porte-cochère ou au fond d’une cave, ceux que j’appelle les malchanceux, qui ont fréquenté les services de chirurgie faciale et de rééducation fonctionnelle, ceux que l’absence de langue oblige à communiquer par signes, ceux dont les doigts cassés pendouillent comme de petits salsifis avariés, tous vous diront que mon efficacité trouve sa source dans une qualité rare : la persuasion.
Dans mon métier on se doit d’être persuasif. Je suis bien au-delà du troisième couteau, je suis le dernier rappel, le tomber de rideau, celui qui vous parle les yeux dans les yeux quand l’ardoise a besoin d’un coup d’éponge. Je mets un terme, quelquefois définitif, à la vague de naïveté qui submerge l’emprunteur, celui qui s’imagine que l’on ne lui fera aucun mal tant qu’il devra des sous, sa vie servant de garantie, le pauvre mec qui se croit chez Darty, avec contrat de confiance et tout le tremblement. Il ne sait pas que sa dette est exponentielle, qu’elle va grandir en même temps que sa douleur et qu’il devra l’acquitter d’une façon ou d’une autre. Il ne sait pas qu’il va être victime de ma persuasion.
La pendule cosmique qui égrène les secondes depuis le Big-Bang originel se remet à l’heure exacte quand la rondelle d’acier se pose sur le front de l’indélicat. Découverte du troisième œil. Grand moment de vérité. Instant ultime. Recueillement. Plus de cachotteries. Plus de mensonges. Le réel retrouve ses droits. Terminé la vie à découvert, les réseaux sociaux trompeurs, la famille en carton où les vieux déblatèrent sur les jeunes, où les enfants pissent sur la gueule des parents. Une dernière pensée pour l’ennemi qui va nous survivre, pour l’ami qui va nous manquer. Le champ de vision de l’endetté se réduit, il louche en regardant le corps luisant du canon qui prolonge de quelques centimètres sa longévité précaire.
Une arme c’est comme la lutte des classes. Mieux vaut être du côté de celui qui ramasse l’argent et vit dans l’opulence. Mieux vaut éviter le côté obscur où le trajet s’arrête au terminus des impayés, là où la mort ne fait pas crédit. Le plus drôle c’est que les gens n’y croient plus, aux armes. Ni à la lutte des classes d’ailleurs. Errare humanum est. Il n’y a pas de pensée unique, ni d’intérêt commun. Il y a celui qui porte une arme et celui qui creuse. Sergio Léone est un visionnaire marxiste, ses héros refusent de creuser, leurs flingues sont le dernier rempart contre le capitalisme ambiant. La série américaine formatée à Wall Street banalise mon outil de travail, certains me prennent pour un figurant, un flic aux dents blanches avec un doctorat en psychologie qui brandit une arme comme d’autres agitent un téléphone. Je dois briser des phalanges, casser des genoux, faire sentir la dureté de l’acier, la fraîcheur du canon, l’odeur de la poudre, pour avoir un tantinet de crédibilité. Encore la persuasion.
Je suis plus cher qu’un courrier recommandé, c’est vrai, mais avec moi il n’y a jamais de réclamations. Je n’hésite pas à débiter le débiteur. Pas besoin de médiation ni de palabres stériles qui accouchent d’un délai difficile à respecter, le fameux délai qui augmente les intérêts et diminue l’espérance de vie. Je n’ai aucun remords à faire disparaître les rêveurs, ils ont déjà la tête dans les étoiles. La balle fatale, le sac de chaux et les pelletées de terre sont les inconnus d’une équation délicate à résoudre. Mais les mathématiques sont inutiles, mon dix sur vingt au brevet des collèges suffit amplement. Je dois simplement être convaincant.
Dans quelques jours je raccroche, je range l’attirail au grenier. Direction les Bahamas où m’attend un joli pécule, du blé que je n’ai pas emprunté, gagné avec du sang, de la poudre et des pleurs. À moi de me laisser convaincre par les marchands de bronzette et de soirées langoureuses, toutes ces tentations accessibles à coups de liasses, ces corps prêts à tout pour une miette de gâteau, quand le champagne dégouline entre une paire de seins puis s’écoule dans le sillon entrouvert d’une call-girl très persuasive.

Putain de caillou dans ma godasse. Tout a foiré lamentablement. Je pense à Jim Morrison, là-bas à Paris, sa tombe au Père-Lachaise, avec les chewing-gums collés sur l’arbre qui lui fait de l’ombre. L’instant est béni, tout le reste est souvenir. Jamais trop compris le sens de sa phrase mais c’est tellement beau. La douleur submerge mes poumons qui glougloutent et se vident dans le caniveau. J’ai deux fois vingt-sept ans. J’ai fait du rab. This is the end.


Elle est là, devant moi. À genoux. Elle sanglote. Mon arme caresse sa tempe. Je n’ai plus qu’à presser la détente. Mon dernier contrat.
Elle relève lentement la tête et me regarde, les yeux pleins de larmes. Elle déroule une phrase en boucle, une sorte de litanie désincarnée, à peine audible, genre mantra du bouddhiste, un mot de passe pour l’éternité. Ses lèvres s’agitent en égrenant trois mots :
— Eu. Ai. An. Eu. Ai. An.
Rien compris. Je tends l’oreille. Je ne supporte pas les gens qui marmonnent avant de faire le grand saut, ils me prennent pour leur confesseur, erreur sur la personne, ici pas de protocole administratif pour la mise à mort, pas de dernière cigarette, de verre de rhum et d’aumônier à l’haleine de ragondin dont l’air compréhensif vous dégoûte définitivement des bondieuseries. Aucune intervention divine ne vient enrayer mon processus d’élimination, pourtant je m’en coltine des Je vous salue Marie, des Notre Père qui êtes aux Cieux. Tout ça c’est pipeau et balai de crin.
Je ne suis pas habitué aux confidences en catimini, mon quotidien s’intitule Cris sans Chuchotements, au niveau de la bande-son je suis plus proche de Sam Peckinpah que d’Ingmar Bergman. Par-dessus le marché je souffre d’une surdité non reconnue comme maladie professionnelle. J’exerce un métier où il est difficile de se soigner dans les règles. Le prix d’un sonotone ! Ah les voleurs ! Pas de sécu, ni de mutuelle. L’indépendant paie tout de sa poche. Fichu système. Vous me voyez passer un test audiométrique à la médecine du travail ? Imaginez un peu la gueule du toubib auscultant mes tympans endommagés par les multiples déflagrations. La plupart des sourds sont muets et je ne suis pas bavard. Mon corps est un bathyscaphe qui sonde les abysses, radio sur off et sonar en panne. Les grandes profondeurs sont comme les étendues cosmiques, des espaces silencieux où la main de l’homme n’a jamais mis le pied, où la quiétude des trépassés balance le vacarme des vivants. On n’élève pas le ton dans le monde du silence, la devise de Tabarly, le marin noyé sans bruit pour ne pas déranger les poissons.
La femme ne reprend pas son souffle, elle devient écarlate, elle vide ses poumons tout en répétant inlassablement :
— Je t’aimais tant, je t’aimais tant, je t’aimais tant, je t’aimais tant.
C’est là que tout glisse dans l’irrationnel. Ce regard, cette voix. Je me chope le double effet Kiss cool en pleine tronche. Un début de migraine me vrille le front. L’effort de mémoire est violent, les souvenirs se télescopent, s’enchevêtrent. Trop vu de visages en vrac, de faciès grimaçants, de bouches tordues par la peur, de nez coulants. Je ne reconnais plus personne chantait B.B en frottant son cul sur la selle d’une Harley. Pareil pour moi, le short en cuir et les accords du beau Serge en moins. Mon boulot est fait d’oubli, le job rêvé pour amnésique. Je ne me souviens même pas du quidam que j’ai effacé hier. J’évite la routine. Je tue toujours pour la première fois. Mon cerveau n’est pas encombré par le trombinoscope macabre, le catalogue de viandes froides pour insomniaque chronique. Je dors comme un bébé, en chien de fusil, le flingue sous le traversin. Une seule personne visite encore mes nuits. Une femme inoubliable.

J’avais trois poils au menton quand j’ai rencontré Laura. Nous étions collégiens. Moi en fin de calvaire scolaire, elle au milieu d’une brillante trajectoire. Un parfum de retrouvailles flottait dans l’air quand nos regards se sont soudés. Notre amour venait de loin, de l’Antiquité, peut-être de la Préhistoire. Une incroyable impression de déjà vu, comme si nous avions déjà passé mille nuits ensemble. Nous avons échangé quelques phrases inutiles, pour la forme, pour donner l’illusion du coup de foudre à ceux qui nous observaient. Je connaissais le goût de ses lèvres avant de l’embrasser pour la première fois. Elle répondait aux questions que je n’avais pas encore posées. Laura avait un sourire à décongeler un mammouth, je frisais la crise cardiaque chaque fois qu’elle me montrait ses petites dents blanches. Je rajoutais des couches d’humour adolescent pour la faire rire un peu plus, pour l’aimer un peu plus. L’ange et le pitre. De la pure magie. L’âme sœur. Bien au-delà du bonheur. Le moment de grâce indescriptible. Les pieds ne touchent plus le sol, on se tient droit, la flèche de Cupidon plantée bien profond entre les omoplates. Je n’ai jamais plus ressenti un tel choc, une telle émotion. Jusqu’à aujourd’hui. Ce regard mouillé me ramène trente ans en arrière.

Pochette de disque. Rouge. Une fenêtre jaune avec quatre chevelus. Celui de droite avec une barbe de pâtre grec. Jim. Galette sur la platine. Elle saute du lit. L.A. Woman. Elle sort de l’alcôve. L.A. Woman. Elle danse. Nue. L.A. Woman. Nous chantons à tue-tête. L.A. Woman sunday afternoon. Une saloperie de petite larme roule sur ma joue. Mon cœur s’emballe. Ses bras autour de mon cou. Souffle chaud sur mes lèvres. Il faut lui dire. Je tente. T’as de beaux yeux, tu sais. Regard surpris. Elle attend autre chose. Elle m’embrasse. Déçue. Pas compris. Trop con. Puceau du cerveau. Léger duvet sous le pif. Guerre des boutons sur le front. Un gamin. Elle veut Rhett Butler. Elle veut Brando.
Sur les quais. Promenade. Main dans la main. La Seine en crue. Des troncs énormes, charriés comme des allumettes. Bing. Bang. Dans les piles du Pont Neuf. Un clodo nous tape une cigarette. Sympa. Instruit. Il nous parle de Gabin. Gueule d’Amour. Pépé Le Moko. Les cahiers du cinéma à lui tout seul. Elle se marre. Hi. Hi Hi. Petite musique emportée par le vent glacial. Chocolat brûlant dans un bistrot du Quartier latin. Pieds gelés. Besoin de chaleur. Besoin de câlins. On rentre chez nous. En riant.

Sous les toits. Nos rires réveillent le voisinage. Des vieux qui ne baisent plus depuis René Coty. On les emmerde. Pas le temps de faire le lit. L’Amour en continu. Jour et nuit. La piste aux étoiles. Lion de l’Atlas. Trapèze volant. S’il te plaît, va tourner le disque, la face B est géniale. Chute du plumard. Je me fracasse. Sans filet. Le cul à l’air. Rires. L.A. Woman. Are you a lucky little lady in The City of Light.

Victoria Station. Elle s’écroule sur son sac à dos. Vingt heures de voyage. Toujours le sourire. Même fatiguée. Caractère en or. Perle rare. Bijou. Un coup d’œil au kiosque à journaux. Pope is dead. Paul the Sixth a cassé sa tiare. Vont sûrement trouver un septième. Ou commencer une série. Fais du feu dans la cheminée. Les tabloïds persifleurs. Moqueurs. On rigole. On s’en fout. On veut voir Londres. Et ne jamais mourir. Nos chemins ne mènent pas à Rome. Première nuit sinistre. Une ruelle à la Dickens. Hôtel boui-boui. Moquette épaisse qui sent l’urine. Le proprio à la gueule en vrac. Souvenir du Blitz. Éclat d’obus dans la mâchoire. Recousu de travers. Sorti tout droit des studios Hammer. Un Picasso en live. Terrifiant. Accent cockney prononcé. Rien compris. Elle flippe. Moi aussi. Earl’s Court. Quartier turc. B and B douillet. Lit grand comme un stade. Wembley à guichets fermés. Douche dans le couloir. Continental Breakfast. Yes. Please. Un disquaire de folie. Soho. Regent Street. Une montagne de vinyles. Neufs ou d’occasions. King Crimson. Sparks. Caravan. Pink Floyd. Musique à tous les étages. Nirvana du rocker. Extase suprême. Bouffe dans un Wimpy’s. Incroyable. C’est bon. Cinéma à Covent Garden. Revenge of the Pink Panther. Peter Sellers fait un malheur. Les gens fument. Mangent. S’engueulent. Chantent. Bordel indescriptible. La fête du slip. On se marre comme des baleines. Rien compris au film. Londres en long. En large. En travers. Des Punks. Des Hell’s. Des Krishnas. Anarchy in the UK. St James Park. Regent’s Park. Hyde Park. Roulades dans l’herbe. Baisers sans fin. En apnée. C’est bon l’Angleterre. God save the Queen.

Elle me dit :
— Vas-y, Dan, fais ce que tu dois faire. Je t’aimais tant.
Je range mon arme. Je m’accroupis près d’elle. Je la serre dans mes bras. Elle pose sa tête sur mon épaule.
— Je suis morte cent fois. Je t’en supplie, tue-moi pour de bon.
Je sens des larmes sur mes joues. Je n’ai pas pleuré depuis qu’elle m’a quitté.
— On ne peut pas tuer un fantôme, Laura.
Elle se redresse.
— Ils vont t’avoir, Dan.
J’imite le collégien qui déconnait, autrefois.
— Je sais, Laura. Je m’en fous.
Elle prend ma tête dans ses mains. Elle me sourit.
— Nous allons partir tous les deux ?
Je retrouve ce regard qui a changé ma vie.
— Ensemble, Laura. Ensemble.

Elle me donne la main. Comme avant. Pourtant rien n’est comme avant. Londres a changé. Nous aussi. Queen’s Walk. Une ballade bien clean pour touriste photographe. Les quais de la Tamise ne sentent plus l’urine. Le karcher des jeux olympiques a raclé le béton jusqu’à l’os. Pas de papier gras. Pas de crotte de chien. Que dalle. Même pas un petit crachat. Monsieur propre est passé par là. Time for lunch. Les louveteaux de la City se déplacent en meute. Ils s’éparpillent dans les pelouses en aboyant. Un merdeux en costard mord dans un Panini. IPhone en pogne. Coupe de douilles à la Ronaldo. Eau de toilette en bidon de cinq litres. Tablette dans le sac à dos. Un blaireau en moule-bite fait son running en causant dans l’oreillette. Une working girl maquillée au rouleau lèche le couvercle de son Tupperware. Les clodos ont disparu. Séquestrés dans des résidences où l’odeur d’ammoniaque a remplacé celle du dessous de bras. Régime jockey. Viande panée. Eau du robinet. Pour eux c’est peut-être mieux. Pas sûr. Pour moi c’est moins bien. Ça manque de charme, d’humanité. Boris, le maire flamboyant, a tout nettoyé. Du sol au plafond. Londres a perdu son brouillard, ses puanteurs. Même les vieilles pierres sentent le neuf. Un fumet de toile cirée et de peinture acrylique. On se croirait à Castorama. Elle ne dit rien. Elle sait. Je sais qu’elle sait. Elle sait que je sais qu’elle sait. Sa peau est moite. La pression de ses doigts n’est pas naturelle. Demain tout sera fini. Nos retrouvailles sont des adieux. Pars, surtout ne te retourne pas. Pars, fait ce que tu dois faire sans moi. Finir en beauté. Mourir sous les applaudissements. En crânant. Elle, avec un mouchoir à la main. Moi avec un flingue à la ceinture. No woman. No cry. Woman. Little sister. Don’t shed no tears. Faut vraiment être défoncé sévère pour écrire une si belle chanson. Avec en prime une saloperie de tumeur qui vous bouffe le cerveau.
Marylebone Lane. Nous poussons la porte du Golden Hind, petite cantine qui ne paye pas de mine, tables en formica et chaises de bistrot, mais où le Fish and Chips est tout simplement grandiose. Nous mangeons en silence, en échangeant quelques œillades apaisantes et sereines.
Ils nous attendent dans la rue. Une véritable armada. Le commanditaire n’a pas regardé à la dépense, quatre hommes pour nettoyer un retraité de la gâchette et une flambeuse de cinquante kilos, visiblement ils se méfient de mes réflexes.
Le concerto pour artillerie lourde démarre plein pot. Une musique que je connais bien. Les méchants ne sont pas venus avec des lance-pierres. Je dégaine. Je cueille le premier en pleine poire. Sa tête éclate comme une citrouille trop mûre. Happy Halloween. Le calibre 44, à moins de dix mètres, ça ne fait pas de cadeau. Le tueur s’effondre sur une Fiat Punto et glisse le long du capot en laissant une traînée sanglante. J’ajuste une deuxième cible quand, soudain, Laura vacille. Je me penche vers elle, je déguste une volée de balles en pleine poitrine. Percé, troué, vaincu, je m’allonge sur le trottoir.
Son sourire est figé. J’ai l’impression qu’elle me regarde encore. Ils l’ont tué en premier pour me faire souffrir davantage. Ils ont réussi leur coup. J’ai mal, affreusement mal, on dirait qu’un chien me bouffe les tripes.
Le porte-flingue en chef est un grand fifre qui se la joue Pierce Brosnan. Brushing laqué, pompes brillantes comme un miroir de bordel, gants en chevreau. C’est moi qui l’ai formé. Adroit, discipliné mais pas malin pour deux sous. Si j’étais d’équerre, il ne ferait pas long feu avec sa dégaine de bureaucrate. Mais les jeux sont faits. Il me domine, son arme dirigée droit sur mon front.
Je souffle :
— Hé ! Ducon ! T’as déjà été amoureux ?
Il se marre.
— Dan, tu sais bien que dans notre métier on ne doit pas s’attacher. Mais pourquoi tu m’appelles toujours Ducon ?
— Réponds à ma question, Ducon.
— Non, Dan. Jamais été amoureux.
Je murmure en bavouillant du Viandox :
— C’est pour ça que je t’appelle Ducon.
Son regard vire au gris. Ses mâchoires se crispent. Le spadassin endimanché n’a pas un brin d’humour. Il appuie sur la détente.

Dernière lueur avant les ténèbres.

3 commentaires:

  1. Ça commence mal, ça se termine mal, logique. Un mix de "Laura" d'Otto Preminger et des " Forbans de la nuit" de Jules Dassin, des références qui tiennent la route.

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  2. Dans la peau d'un porte flingue amoureux. Il y a des fulgurances, mais c'est pour moi trop décousu pour que la nouvelle me captive de bout en bout. Cela vient du fait que l'auteur ne raconte pas une histoire mais les derniers moments d'une vie, vous savez ceux que vous voyez avant de mourir, le bilan rapide de ce que vous avez fait. S'intéresser au personnage plus qu'à l'histoire est un parti pris mais je trouve que la nouvelle est trop courte pour que cela marche, en tous les cas avec moi.

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  3. Trop haché. J'adore les découpages, mais là, c'est juste pas facile à lire... Des points, puis des points, jamais de virgules...
    Pas compris où je devais aller...

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