samedi 30 janvier 2016

La silhouette c’est peu – Nathalie Peyrebonne – Editions Phebus

La plupart des chroniques sur ce blog concerne des romans policiers, des romans noirs ou des livres jeunesse. Ce livre n'entre dans aucune de ces catégories, quoique, à sa façon, il est bien sombre aussi. Mais j'ai eu un vrai coup de coeur et je compte bien vous le faire partager.

De quoi s'agit-il ?

Tandis que des dictons parsèment depuis peu les rues de Paris, sans qu’on sache ni qui, ni pourquoi, nous allons voir progressivement quatre personnages s’esquisser par petites touches, au fil des mots et des dictons, comme un tableau impressionniste.

Angélique, la quarantaine, a décidé de ne plus quitter son appartement. Elle n’est pas aigrie, ni malade, mais elle ne veut plus être que spectatrice de ce monde qui vacille. Diane, elle est conductrice de taxi, elle s’interroge sur ses amours et elle attend. Agnès, scaphandrière, oublie le jour le chaos de sa vie recomposée en plongeant dans les eaux sombres de la Seine d’où elle extirpe parfois quelques trésors dérisoires. Edmé, un SDF, s’est choisi, comble de l’ironie, une marquise en guise d’abri.

Quatre personnages, donc, dont on sait peu de choses et qui vont, comme à la lueur d’une bougie, être partiellement éclairés d’une lumière mouvante, par les mots de l’auteure. On devine plus qu’on ne voit. La part d’ombre et de mystère reste plus importante que ce que l’auteure décide de nous dévoiler.

Les dictons sont les petites clés qui éclairent jour après jour une facette de la vie ou de la personnalité d’un personnage ou d’un autre. Introduisant chacun des quarante-cinq courts chapitres de ce récit, ils marquent aussi le temps qui passe. Du 30 aout « journée mondiale des personnes disparues » au 25 mai « journée mondiale de la serviette » en passant par celui du Saint Rémi, celui ou perdreaux vaut perdrix ou par la Sainte Catherine, quand tout arbre prend racine. Ils donnent sens parfois philosophique, souvent ironique à chacun des chapitres.

J’ai tout particulièrement aimé la plume légère de l’auteur. Elle est pleine de douceur et de poésie, mais cela ne l’empêche pas, bien au contraire, de nous renvoyer à travers ses mots quelques vérités bien senties. C’est un livre léger, mais loin d’être inconsistant. Cette légèreté n’empêche pas, et c’est toute la force de ce récit, de laisser une empreinte durable dans nos esprits. Il nous invite à nous interroger, à faire un pas de côté pour observer le monde et y trouver notre place plutôt que de continuer à nous agiter vainement dans l’arène.


samedi 16 janvier 2016

L'heure des fous - Nicolas Lebel

Vous n’aviez pas envie que les vacances se terminent ? Vous n’avez pas envie de vous prendre la tête,mais de lire un chouette polar à l’intrigue bien ficelée ? Vous êtes fan de personnages hauts en couleur ? Alors si vous ne connaissez pas encore Nicolas Lebel et son livre « L’heure des fous » c’est le moment de découvrir ce livre et la galerie de personnages qu’il nous a concocté.

En premier chef, Merhlicht. La voix rapeuse comme de la toile émeri, une gueule à faire peur, noyée dans un quasi-permanent smog bleuté aux vapeurs de gitane.
Son bras droit bodybuildé aurait pu choisir d’être architecte, tant son goût du carré, de la ligne droite d’où rien ne dépasse est très en harmonie avec le design d’aujourd’hui.
Pour compléter l’équipe, une rouquine qui ne s’en laisse pas compter. Il faut dire que pour trouver sa place auprès de ces deux énergumènes, il vaut mieux avoir un sacré caractère.
C’est cette équipe de choc que découvre notre quatrième larron, un flic stagiaire qui se demande ce qu’il fiche dans cette équipe. Mais il n’a pas tellement le temps de se poser la question, car un macchabée vient de leur tomber sur le paletot. Comme c’est un clodo, une enquête de routine devrait clore l’affaire rapidement, mais contre toute attente, l’histoire va déraper !


Si comme moi vous aimez les histoires écrites avec pas mal de verve, vous allez être servis. Il y a un éloge appuyé aux dialogues d’Audiart dans ce livre. Le vieux Merhlicht, probablement oublié par les théories de l’évolution est resté scotché aux années soixante et, tant dans ses méthodes d’investigation que dans son langage, il se frotte au monde et techniques moderne, portées par le reste de l’équipe et le jeune stagiaire.

Mais cela n'empêche absolument pas ce roman d'être moderne. Pas de nostalgie naphtalinée , ce n’est pas un remix des tontons flingueurs. C’est bien du monde d’aujourd’hui dont nous parle Nicolas Lebel et le ton léger du roman n’empêche pourtant pas quelques réflexions sur la place des laissés pour compte de notre société ou sur les techniques de manipulation des masses. Bref, c’est un livre à lire pour le plaisir et le divertissement, mais pas seulement.  Alors surtout, n'hésitez plus, filez le lire !

vendredi 15 janvier 2016

Enfin (tous) réunis - Annabelle Lena - Editions du Caïman



Marseille. Un crime. Celui d’un proxénète, un couteau en plein cœur. Cela pourrait être une banale histoire de vengeance, d’autant qu’il n’est pas le premier à s’être fait planter ainsi.

Le commissaire Rognes et son équipe sont en charge de cette affaire, et à part une vieille photo qui irrésistiblement attire le regard du commissaire, ils n’ont pas grand-chose à se mettre sous la dent pour lancer l’enquête.

Avec une telle entrée en matière, vous pourriez vous attendre à un polar plutôt classique. Mais c’est sans compter sur le talent d’Annabelle Lena. Elle campe dans ce roman des personnages forts. La ville de Marseille habite ce roman. Loin d’être un simple décor,  un faire-valoir,  elle en est un personnage à part entière.

Ne comptez pas sur moi pour vous dévoiler le moindre élément de l’intrigue. Cette dernière est trop bien ficelée pour que je me risque à vous gâcher la surprise en en révélant ne serait-ce qu’un élément. L’histoire est haletante jusqu’aux toutes dernières pages du récit. J’ai adoré la chute de l’histoire qui m’a vraiment cueillie par surprise. Mon seul bémol  quant à ce livre  est la succession de petites annotations en bas de page pour qui ne connaitrait pas le parler marseillais, ses traditions. Mais rien ne vous oblige à les lire et franchement ce serait dommage que cela vous arrête dans votre élan pour le commander auprès des éditions du Caïman.
Pour tout vous dire, j’espère bien qu’il y aura une suite, car c’est impossible que cette histoire en reste là. Je n’ai qu’une hâte, retrouver  la plume d’Annabelle Lena, alerte, incisive qui croque ses personnages avec une bonne dose d’humour grinçant.